Trois éléments de la gentillesse

Ce texte est une traduction de l'article"Three elements of kindness" écrit par Scott David Gray sur le blog de la Sudbury Valley School. Scott David Gray est un ancien élève de la Sudbury Valley School. Il est membre du personnel de Sudbury Valley depuis de nombreuses années. Je remercie la Sudbury Valley School de m'avoir autorisée à publier la traduction de cet article sur ce blog.

 
photo : Hamish Irvine
 

Sudbury Valley est un endroit incroyable. Au sens littéral du terme, car de nombreuses personnes ne croient tout simplement pas qu’une école puisse être aussi agréable et fonctionner aussi bien. Tout du moins jusqu’à ce qu’ils nous aient vus en action.

Ce qui étonne et surprend tant de gens, c’est à quel point chaque personne dans l’école est respectueuse et attentionnée. On entend à Sudbury Valley bien plus souvent qu’ailleurs des mots agréables comme « merci » et on voit régulièrement des personnes qui s’intéressent sincèrement aux autres. Certains offrent même un soutien chaleureux à chaque personne croisée à l’école.

En septembre, à chaque début d’année scolaire, je me rends particulièrement compte à quel point la communauté est bienveillante. Chaque année, la rentrée me semble encore meilleure que celle de l’année précédente. Les étudiants qui reviennent sont ravis et enthousiastes de revoir leurs amis, de renouer les uns avec les autres, et de retrouver des intérêts communs. Mais ils sont également (et particulièrement) ravis et enthousiastes de voir de nouveaux visages ; ils sont non seulement accueillants et chaleureux, mais ils vont activement faire connaissance avec les nouveaux étudiants.

Comment cela est-il possible ? Qu’est-ce qui génère autant de prévenance chez nos étudiants ? Je voudrais suggérer trois éléments qui contribuent à la gentillesse et à la prévenance qui sont les emblèmes de l’école.

Le temps

Les étudiants à Sudbury Valley n’ont pas besoin de courir. Contrairement aux enfants dans tant d’autres endroits, ils peuvent se détendre et explorer au sein de leur école, sans avoir peur que l’on mette brutalement un terme au temps dont ils disposent. Il n’y a pas de sonnerie leur intimant l’ordre de s’asseoir et d’écouter passivement un adulte. Ils ont le temps, au sein d’une communauté de pairs.

Quand on porte attention au quotidien de la plupart des enfants dans les écoles traditionnelles, on voit des personnes dirigées par le temps. Une grande partie de l’impolitesse, et même du harcèlement, semble émerger du manque de temps pour soi. Et même ce temps pour soi est rationné au profit de toutes ces activités qui sont estimées importantes par d’autres personnes. Ainsi, une personne peut se comporter de manière brusque afin de faire partir ceux qui l’interrompent, pour pouvoir profiter au mieux du peu de temps dont elle dispose.

Avec le temps vient le temps pour les autres.

 
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Communication

Ce temps avec d’autres personnes conduit à un intérêt sincère pour les autres. Avec suffisamment de temps, cet intérêt ne diminue pas, mais est au contraire intensifié par la rencontre avec ceux qui ont des centres d’intérêt très différents et des manières de voir le monde très diverses. Dans un tel environnement, la communication s’épanouit jusqu’à son plein potentiel.

La communication avec les autres rend conscient de son environnement. Elle permet une compréhension des autres plus entière et plus profonde, et pas seulement des personnes avec qui on a passé le plus de temps. La règle d’or semi-narcissique « ne fais à l’autre que ce que tu voudrais qu’il te fasse » devient plus large et agréable, et ressemble à « fais à l’autre ce qu’il lui semble raisonnable de vouloir que tu lui fasses ».

La vraie communication est la clé pour respecter les autres.

Les droits et le pouvoir personnel

Le respect signifie que l’autre (par le simple fait d’être humain, pas parce qu’on a été magnanime) a des droits que l’on ne peut pas enfreindre. La culture de la Sudbury Valley School reconnaît que les personnes dans l’école ont certains droits, simplement par le fait d’être des personnes. L’école ne se voit pas pas comme ayant accordé ces droits, et elle ne peut pas (éthiquement) enfreindre ces droits.

Quand on confie le pouvoir et le respect aux gens, ils ont la motivation pour être à la hauteur de cette confiance. Ils n’ont pas la frustration d’avoir été privés de ce qui leur revient de droit. Quand on reconnaît les droits des personnes, celles-ci peuvent reconnaître les droits des autres sans jalousie. Il y a même un désir intéressé de respecter les droits des autres, et ainsi de faire en sorte que personne ne puisse jamais avoir d’excuse pour enfreindre ses propres droits. Ce respect pour les droits individuels et la souveraineté personnelle empêche les gens de décider pour d’autres ce qu’il serait bon de faire.

 
Photo : Eddi van W.

Photo : Eddi van W.

 

Une culture de gentillesse

Je crois que ces trois éléments sont essentiels à une culture de gentillesse et de bienveillance. Les gens à Sudbury Valley ont le temps d’être gentils, ils ont suffisamment d’expérience en communication pour pouvoir être réellement empathiques, et ils ont assez de respect envers les autres pour ne pas devenir autoritaires.