Mais quel cadre ?

Imaginez un groupe d’enfants libres de décider comment ils occupent leurs journées…

Des images de chaos vous viennent à l’esprit ?

Ou bien vous imaginez que certains enfants exerceraient une forme de violence sur d’autres en toute impunité ?

 On dit souvent :

« la liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres »

Au coeur du projet éducatif de l’École Sudbury Lilloise figure une notion fondamentale : la liberté de chaque personne. Quel que soit son âge, quel que soit son statut, membre du personnel ou élève (quoique les membres du personnel ont un rôle différent de celui des élèves, ils ont plus d’obligations et de responsabilités, mais c’est une autre histoire…)

Si nous devons penser à la liberté de chaque personne, nous serons forcément amenés à limiter la liberté de chacun. Il faut donc des règles. 

→ La liberté de décider de son parcours éducatif n’équivaut pas à l’absence de cadre.

 
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Prenons quelques exemples pour l’illustrer :

On n’a pas le droit de taper, ou de crier sur quelqu’un. On n’a pas le droit d’harceler.Autre exemple : on range derrière soi. Chacun doit pouvoir accéder à un espace rangé, retrouver les objets communs en bon état, sans devoir les chercher ou les ramasser par terre. Donc si j’utilise un objet, quand j’ai fini, je range derrière moi. Lorsque les libertés de plusieurs personnes entrent en collision, il est possible que le cadre soit plus délicat à définir :

Imaginons que quelqu’un écoute une émission bruyante dans la pièce principale. Il a le droit d’écouter ce qu’il souhaite (tant que c’est légal), et en même temps, les personnes présentes ont le droit de ne pas subir une émission sonore qu’elles n’ont pas choisie.

C’est là que la question du cadre à poser commence. D’abord lors de conversations informelles, durant un temps plus ou moins prolongé et complexe (« Et toi t’en penses quoi ? Parce que Y pensait que xxx et j’ai trouvé cette idée intéressante, mais en même temps, si on fait ça, il risque d’arriver ça, etc » « ah oui, je suis d’accord, mais… » ou bien « ah non, si on fait cette règle-là, comment on va faire pour xx ? » etc. )

Ces questionnements peuvent amener quelqu’un à faire une proposition au Conseil d’École pour d’adopter une nouvelle règle. N’importe quel élève ou membre du personnel peut le faire. Au Conseil d’École, cette proposition sera débattue et modifiée si besoin, pour qu’elle corresponde au mieux aux libertés de chaque personne.Va-t-on interdire purement et simplement l’écoute bruyante des émissions dans la pièce principale ? Mais si A. qui écoutait son émission dans cette pièce voulait en même temps pouvoir manger, et que c’est la seule zone où on peut manger ?Va-t-on imposer un niveau sonore maximal ? Mais peut-être que certains souhaitent lire dans cette pièce, sans bruits électroniques. Vont-ils devoir aller dans une salle calme ? Va-t-on délimiter des zones bruyantes, et d’autres silencieuses ? Ou imposer le port d’un casque ? 

Toute question, aussi triviale qu’elle puisse paraître au premier abord, peut susciter des débats complexes. Il existe une multitude de solutions, et chaque solution a ses avantages et ses inconvénients. Aucune n’est parfaite. Le groupe va débattre pour trouver une règle sur laquelle s’accorder, à ce moment-là, afin de respecter au mieux la liberté de chacun.

Chaque personne, quel que soit son âge, dispose d’un pouvoir égal lorsque le débat et le vote auront lieu.(S’il s’avère que la règle votée n’est pas adaptée, qu'elle est inappropriée ou imparfaite, elle pourra être modifiée lors du prochain conseil d’école.) Ainsi, les enfants et adolescents apprennent par la pratique ce que signifie d’être libre au sein d’un groupe : on choisit ce que l’on fait de soi-même, mais l’on ne peut pas faire ce que l’on veut des autres, ni du matériel. Les besoins des autres doivent être pris en compte : de la même manière que je souhaite que mes besoins soient pris en compte, je prends en compte ceux des autres. 

Et en bonus, chaque enfant apprend à :

  • Exprimer son point de vue,

  • Écouter le point de vue de l’autre,

  • Imaginer des solutions à des problèmes,

  • Évaluer les avantages et les inconvénients des différentes options,

  • Faire des compromis,

  • Essayer une solution, en analyser les résultats et améliorer ce qui peut l’être.

(liste non exhaustive :) ) 

Des compétences utiles pour les futurs adultes du XXIème siècle ! 

Cécile Prokop1 Comment